lundi 9 février 2009

12 - La premiere spéciale


La nuit du 2 au 3 Janvier, date de la première vraie spéciale, fut très courte et agitée. De retour á l'hôtel vers minuit, Catherine et moi ne trouvons pas le sommeil. L'idée qu'il faille se lever á 4h30 du matin nous stresse plus que ne nous incite á dormir.
Je retrouve les autres pilotes á 5 heures du matin prés du camion d'assistance. La température est très douce et j'enfile les accessoires de protection en carbone. Mon carton de pointage indique 6h17. Les pilotes n'étant autorisés á pénétrer dans le parc fermé que 15 minutes avant leur heure de départ assignée, cela me laisse encore un peu de temps pour bavarder, signer quelques autographes, plaisanter avec Cathy... bref, tout ce qui pourrait faire oublier l'inévitable échéance car les doutes et les craintes m'envahissent; peur de ne pas être á la hauteur et aussi de réaliser que la douceur de ce vieux rêve vient de disparaître á jamais, remplacée par la réalité et les risques que cela comporte.
Avec deux autres pilotes de l'équipe MécaSystem, nous avons convenu d'effectuer ces premiers 225 km de liaison ensembles, tous certifiant sur l'honneur de ne pas dépasser les 90 km/h pour ne pas endommager les mousses de polyuréthane qui remplacent les chambres á air sur des motos de rallye. Ces mousses sensibles fondent et se rétractent sous l'effet des fortes chaleurs.Des trois ivrognes, je suis le seul á respecter ma promesse, et je me retrouve donc rapidement distancé. Ma moto ronronne merveilleusement bien car á cette vitesse le moteur est très peu sollicité. Je profite de signes d'amitié et d'encouragement des spectateurs placés sur le bord de la route tout au long du parcours. Peut on imaginer un cordon humain de 225 kms?
Le ravitaillement est situé á 2 kms du départ de la première spéciale longue de 380 kms. Une fois les réservoirs pleins, je me présente au CP1 et déjà le juge me fais signe de m'avancer pour prendre le départ. Il me tamponne mon carton qu'il m'aide ensuite á enfiler dans ma veste. J'enclenche une vitesse et je parts presque immédiatement.
La piste est étroite. Le sable, encore chargé de la rosée matinale, est porteur mais déjà creusé par le passage des 200 motos qui m'ont précédées, ayant un peu trop pris mon temps sur la liaison. Je suis raide car je réfléchis trop. Il me faudra une centaine de kilomètres pour petit á petit me débarrasser de cette tension néfaste pour le pilotage et épuisante physiquement. Je retrouve progressivement des sensations oubliées depuis 22 ans. En guise d'entraînement pour le Dakar, j'ai effectué seulement 400 kms sur l'asphalte pour le rodage de la WR450F. C'est seulement maintenant que je réalise que je participe au plus grand rallye du monde, le plus long aussi.
Je me persuade que cette spéciale ne comporte aucune difficulté. Je suis dorénavant á l'aise et j'avale les kilomètres á un rythme régulier, ménageant la monture et le chevalier. De plus en plus sûr de moi, j'étreins la machine entre mes genoux et je dose délicatement la commande des gaz.Alors que je roule á environ 120 / 130 sur une belle ligne droite, l'avertisseur sonore me signale que la première voiture est sur le point de me dépasser. Je me sert sur la droite et presque au même moment la Mitsubishi me double dans un nuage de poussière jaunâtre. Je ne ralenti pas immédiatement, pensant qu'en fixant un nuage á l'horizon je pourrais maintenir une trajectoire rectiligne, la piste en elle même ne présentant pas de danger apparent. Mais bientôt je me rends compte que mon nuage providentiel va être occulté par la poussière dense, montante et persistante. Je ralenti mais il est trop tard. Je perds toute référence visuelle á environ 60 km/h et je m'offre une belle chute, la première, la plus spectaculaire aussi comparée á toutes celles qui suivront.
A SUIVRE....

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