
Le premier ravitaillement au kilomètre 250 me donne l’occasion de saluer et d’échanger quelques mots avec Etienne Lavigne, Directeur de Amaury Sports Organisation. Il se déplace dans uns des 11 hélicoptères du Dakar, ce qui lui permet de venir jeter un œil sur le ravitaillement moto, puis de rejoindre n’importe quel point du parcours en quelques minutes. J’imagine alors le réconfort que devait procurer une rencontre fortuite au milieu du Ténéré avec le très charismatique Thierry Sabine, fondateur du Paris Dakar, mort de sa passion en 1986.
Les pleins sont effectués mais il faut que j’observe un arrêt obligatoire de 15 minutes. C’est le moment dont profitent les pilotes pour avaler quelques barres de céréales, boire une bouteille d’eau et remplir le Camel Bak vide depuis déjà longtemps compte tenu de la chaleur torride. Il fait d’autant plus chaud que nous portons une carapace de carbone sous nos vestes de 3 kilos, ainsi qu’un collier renforcé qui nous protège en théorie du coup du lapin.
Pour d’autres, c’est la pose cigarette. Il est de notoriété publique que la cigarette nuit á la santé, mais après 250 kms de poussière avalée, la première cigarette prend un goût exquis, la deuxième aussi d’ailleurs. Depuis le début de se projet, mon ambition affirmée est de simplement boucler le Dakar. Je me moque totalement du chronomètre. Malgré tout je m’aperçois que je ne suis pas le dernier contrairement á ce que je pensais. Pour un peu je me prendrais au jeu et je démarrerais en trombe en soulevant une belle gerbe de sable derrière moi. Alors pour me raisonner, j’allume une troisième cigarette …
Finalement je repars tranquillement. Je me sens plus á l’aise depuis une bonne centaine de kilomètres. Malgré la prudence que j’affiche, la suspension avant est venue á deux reprises buter dans un claquement effrayant. Compte tenu du débattement important sur ces motos, on peut facilement imaginer l’impact. Mon rythme est régulier mais je dois m’arrêter toutes les deux minutes environ pour laisser passer les voitures. La piste est dangereusement bordée de clôtures en fil barbelé. La Pampa est une région agricole et seules les pistes que nous empruntons délimitent les propriétés. Il n’y a donc aucun moyen de s’écarter de la trajectoire des voitures pour éviter de se retrouver dans leur poussière. Il faut juste s’arrêter le plus vite possible sur ce terrain sablonneux tout en se serrant le long de la clôture de droite, puis attendre que la visibilité se rétablisse un peu.Cette routine durera jusqu’á ce que j’aperçoive une moto arrêtée sur le bord de la piste, á 5 kilomètres de la fin de la spéciale. Cet événement anodin va devenir bientôt un épisode très médiatique, mais surtout un épisode qui sera á l’origine d’une belle amitié avec Stéphane Charlier, pilote Belge. Je vous raconterais cela dans le prochain article : Le bon samaritain.
La liaison de 200 kilomètres se déroule sous une luminosité de fin d'après midi d'été. La route est bordée d'arbres sous lesquels des milliers de familles se sont installées pour regarder passer la caravane du Dakar. Les chaises et les tables laissent supposer qu'elles ont campé là toute la journée. Dans cette ambiance de Tour de France, nous sommes accueillis á Santa Rosa par une foule enthousiaste et le ravitaillement donne prétexte á une très longue séance de photos et d'autographes.Je suis fatigué mais je ne le sens pas. La veille je n'avais pas dormi et je viens malgré tout de terminer ma première spéciale de cette course dont j'ai tant rêvé. Je suis tout simplement heureux et j'ai envie de partager ce bonheur.
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