samedi 31 janvier 2009

9 - Le contrôle technique


Après un Noël passé en famille, j'ai embarqué le 27 Décembre dans un avion Air Canada, direction Buenos Aires. Mon passage dans l'aéroport ne passe pas inaperçu car je transporte avec moi une malle énorme et surtout les deux roues de rechanges que je n'ai pas pu expédier avec la moto pour des raisons de disponibilité chez le fabricant.

Arrivé á destination, je suis accueilli par mon très fidèle ami Juan Carlos. Nous sommes heureux de nous retrouver et nous nous embrassons comme de coutume en Argentine. Il me conduit á la cité universitaire située sur la rive du Rio de la Plata en plein coeur de la ville. L'équipe d'assistance Meca Systeme n'est pas encore arrivée et j'apprends que le débarquement des 800 véhicules venus d'Europe a prit beaucoup de retard. Ceci me permet de faire la connaissance de Annie Seel, une des 3 femmes pilote moto sur les 250 engagés. Son professionnalisme est á la hauteur de sa réputation. En quelques minutes, elle me dresse la liste de tous les détails á modifier sur la moto. Les heures suivantes sont consacrées á corriger la garnitures et le passage de certains câbles, l'inclinaison du guidon, la position de la commande du road book, etc... J'éprouve un léger soulagement lorsqu'elle me félicite pour le système de refroidissement modifié. J'ai en effet placé le vase d'expansion sur la fourche á porté de vue et j'ai installé une commande manuelle de mise en marche forcée du ventilateur, souvenir de mon enfance lorsque nous traversions des régions arides. Mon père avait imaginé ce dispositif bien avant moi.

L'équipe arrive enfin et je fais la connaissance de Gilles Tixador, le team manager, et des 8 mécaniciens qui l'accompagnent. Cyril est affecté á ma moto et nous entamons immédiatement les dernières mises au point, notamment l'installation des antennes de communications et le montage des BIB MOUSSE dont nous aurons l'occasion de parler dans le dossier pilotage.

C'est ainsi que le 1er Janvier 2009 á 12h précises j'entame la procédure du contrôle technique.
á suivre ...

8 - La stratégie de communication



Dans un projet sportif comme le Rallye Dakar, il est nécessaire d'élaborer une stratégie de communication. Dans la théorie la règle du jeu est très simple entre les trois principaux protagonistes qui sont le coureur, le journaliste et l'entrepreneur. Le coureur participe á un évènement médiatique, le journaliste raconte une histoire et l'entrepreneur s'associe á l'évènement pour diffuser un message. C'est ainsi que des scénarios se forgent dans nos esprits, tous plus hypothétiques les uns que les autres. On se charge de convictions et on se rassure. Or, rien n'est gagné d'avance.

Le journal dont vous étiez certain d'obtenir la couverture est contraint aux réalités de l'actualité. La terre de s'arrête pas de tourner parce que vous avez décidé de gravir l'Everest. Le timing est donc extrêmement important lorsqu'il s'agit des médias. D'autre part, bien qu'ils aient pour mission d'informer avec impartialité, le rédacteur en chef d'un journal et le chef des programmes radio ou TV suivent naturellement leurs propres instincts et leurs convictions qui font la couleur du média. Être conscient de ces faits permet donc de rester courtois, humble et patient. Il faut savoir se réjouir d'un petit article en dernière page car c'est déjà une démonstration que votre projet existe.
En ce qui me concerne, j'ai bénéficié d'un reportage télé sur Radio Canada, de plusieurs interviews radiophoniques sur Energie et CKOI, et autant d'articles dans la presse écrite dans l'Express, MX Québec et Onroule.ca. Je peux m'estimer chanceux compte tenu du fait que je ne suis pas connu et que je n'ai aucun palmarès á faire valoir, même si j'avoue avoir espéré plus car j'étais, rappelons nous, le seul pilote du Québec en lisse pour le Dakar 2009.
Paradoxalement, alors que je n'avais aucune stratégie á ce sujet, les médias Argentins, Espagnols , Français et Belge se sont intéressé á mon aventure du fait que j'ai remorqué le meilleur pilote Belge , Stéphane Charlier , en panne dans les dunes lors de la première spéciale.

L'entrepreneur, plus que n'importe qui, est soumis aux lois de l'économie. Il doit protéger son capital, ses ressources humaines, sa productivité, etc.. Cependant il a aussi besoin de diffuser des messages, soit en interne pour consolider une équipe, soit vers l'extérieur pour démontrer sa bonne santé réelle ou non. C'est dans cette faille qu'il faut réussir á s'engouffrer avec beaucoup de persuasion et énormément de chance.

Il s'agit tout d'abord de cibler les entreprises dont on suppose qu'elles ont un message á passer, et surtout que cet éventuel message s'inscrit dans la nature de l'évènement. Il est inutile en effet de solliciter un fabricant de lingerie féminine pour aller faire le Dakar en moto. Ensuite, il est primordial de faire preuve de persévérance sans toutefois tomber dans l'incongru et l'impolitesse. Bien entendu la taille de votre carnet d'adresse peut s'avérer d'une grande aide, bien que personnellement je trouve déplacé de solliciter un entrepreneur juste parce que c'est un ami ou pire encore, un ami d'un ami. Vous n'avez en effet rien á offrir en retour. Il faut être sincère dans sa démarche en s'inscrivant dans une relation gagnant- gagnant.


Tout ceci demande une grande disponibilité. Ces six derniers mois ont été, pour moi et les gens qui m'ont entourés, une succession de temps gaspillé et de maladresses, malgré la meilleure volonté de chacun. Si c'était á refaire, je confierais dés le départ mon projet á un professionnel rétribué, me consacrant exclusivement á la préparation physique et technique.

7 - L'hôpital Ste Croix

Bien des accidents arrivent par excès de confiance.
Nous sommes début novembre. A cause des nombreux déplacements professionnels entre septembre et octobre, j'ai pris du retard sur la préparation physique que j'avais programmé . Ce jeudi, alors que je rentre tout juste du Panama, je prends ma 750cc de route pour me rendre au gymnase club, décidé á rattraper le temps perdu. L'asphalte est humide et la gomme de mes pneumatiques encore très froide. Je balance généreusement ma moto sur la gauche. La roue avant se dérobe inévitablement et j'entame une belle glissade de plusieurs dizaines de mètres. Bien que je sois tombé tous les jours en moto cross durant ma jeunesse, cette chute sera la première de ma vie en circuit routier. J'ai mal aux côtes et á l'estomac. Je redresse ma moto avec peine et je retourne chez moi tant bien que mal, le coude serré le long de mon torse. Arrivé á la maison, j'ai du mal á respirer. Ma voisine Annie me conduit aux urgences je suis pris en charge immédiatement. Bilan : 2 côtes cassées, 2 autres fracturées et saignement de la rate.
Le repos le plus absolu m'est prescrit durant 6 semaines, mais je n'en tiendrais pas compte. Je choisi d'apprivoiser ma douleur plutôt que de faire usage de la morphine et de rester allongé á attendre que cela se passe.
C'est á ce moment que je fais la connaissance de Jean par l'intermédiaire de notre amie Angela. Jean est le seul guérisseur pranique du Quebec. La guérison pranique est basée sur le Prana, c'est á dire l'énergie vitale. N'y voyons ici aucune pratique de sorcellerie ni de tentative d'endoctrinement religieux. Il s'agit tout naturellement d'être ouvert á l'idée que la conscience et la maîtrise des énergies qui régissent notre corps peuvent soulager bien des maux. On peut ne pas y croire. On est même libre de trouver cela ridicule. Moi j'y crois. J'ai exercé des activités physiques avec mes côtes cassées et ma rate lacérée. Durant les milliers de kilomètres effectués sur le Dakar, je n'ai jamais éprouvé de douleur ni même de gêne. Deux semaines après l'accident, je subirai un examen physique de résistance á l'effort á Montréal, seul centre habilité au Québec. Cet examen sélectif est imposé par la Fédération Internationale de Moto. J'y obtiendrai des résultats attendus chez un jeune de 25 ans.
De cette expérience j'en ai tiré 2 leçons. Premièrement, comment se relaxer et prendre les choses avec beaucoup de sérénité, puis, se rappeler qu'au Québec, l'asphalte est froid toute l'année sauf le 15 Août.

vendredi 30 janvier 2009

6 - A mes amis et partenaires



Le souvenir des aventures vécues devient vague avec le temps. Certains détails prennent alors plus d'importance que d'autres. Cependant, il y a une chose que l'on n'oublie jamais... les amis et les rencontres qui nous ont accompagné.


Mettre sur pied un projet aussi conséquent qu'une participation au Dakar en moto ne peut être mené de front par une seule personne. Dans un contexte idéal, le pilote devrait pouvoir se consacrer exclusivement á la préparation technique et physique, alors que son équipe abat les lourdes tâches administratives, financières, relationnelles, logistiques et surtout commerciales qui consiste essentiellement en la recherche de sponsors.


J'ai eu la chance d'être entourré par des personnes extrêmement disponibles et je tiens á leur adresser dans ce blog un remerciement personnel. Il n'y a pas de degré où de hiérarchie dans la spontanéité ou dans les actions menées par les uns et les autres. C'est pour cette raison que l'ordre d'apparition n'a aucune importance á mes yeux. Tous ont eu un rôle particulier bienfaisant.

  • Merci Sophie Chabot pour ta grande disponibilité, ton optimisme candide et ta façon touchante de me faire croire qu'il fait beau même quand il neige.
  • Merci Jocelyn Dumont pour ta constance en amitié, ta philosophie. Merci de m'avoir accompagné dans la préparation. Rouler en KTM est ton seul défaut.
  • Merci Stéphane Guertin (Guertech) pour ta gentillesse et ta passion partagée pour le Dakar. J'ai eu peur á un moment que tu m'assassines pour partir á ma place. Je te souhaite de tout coeur de vivre une belle aventure á ton tour.
  • Merci au personnel de Blubéri et en particulier á l'équipe de Louise Côté qui aurait aimé faire 10 fois plus que ce qui a été possible. C'est déjà beaucoup. Sincèrement merci.
  • Merci Michael Morey (Air Canada Cargo) pour ta grande générosité et tes valeurs humaines. J'aime ta nature vraiment cool.
  • Merci á l'équipe de Motos Thibault Sherbrooke pour votre engagement, votre professionnalisme et votre grande passion du travail bien fait.
  • Gracias Cristian Galarza (ASAP Argentina) por tu ayuda y tu amistad sincera.
  • Merci Marcel Huard pour ta gentillesse et ta générosité même si tu étais convaincu que c'était le plus mauvais investissement de ta carrière. D'ailleurs ça l'est certainement.
  • Merci á Daniel de Gi Logo pour ta gentillesse au moment de réduire notre commande de T-Shirt.
  • Merci Gilles Tixador Team Manager Mecasystem pour m'avoir initié en partageant ton expérience de 33 rallyes.
  • Merci á Europe1, RMC, RTL, Energie, CKoi, Radio Canada, MX Quebec, On roule.ca, L'express d'avoir informé votre public.
  • Merci á VertiSoft et Simplex Drummondville en la personne de Guy et Bruno.
  • Merci Angela Olsen et Jean pour la préparation mentale et physique. J'ai vraiment pu avaler les kilomètres grâce á vous et vos méthodes.
  • Merci Patrick Boudreault de Yamaha Canada pour la commandite en matériel.
  • Merci á Kimpex pour les fournitures d'équipements pratiques sur la moto
    Merci Pierre et Céline de votre soutien moral. On s'est raté á Valparaiso mais on se retrouvera á Drummondville après votre périple de 25000 kms en moto. On prendra une biére...... debout au comptoir.
  • Merci Jean Francois mon voisin et ami de t'occuper de ma femme pendant que je meurs de soif dans le désert. LOL.
  • Gracias Juan Carlos Scelza por du fidelidad en amistad.
  • Merci Jacky et Bernard, la famille.
  • Merci á mes beaux parents Andrée et Maurice.
  • Merci á toutes les personnes qui m'ont témoigné de la sympathie, de la curiosité et de l'enthousiasme, avant et pendant ce trés long périple.
  • TOUT SIMPLEMENT MERCI A TOI CATHERINE MON ÉPOUSE POUR TOUS LES JOURS.

Photo - La Yam sur son terrain favori


jeudi 29 janvier 2009

5 - Une WR450F de rallye



Trouver un préparateur de Rallye raid n'est là encore pas chose facile au Québec. Depuis sa création il y á de cela 30 ans, seuls deux Québécois avant moi ont participé au Dakar, dont Guy Giroux qui s'est illustré en 2004. J'ai eu la chance de rencontrer Marcel Thibault á Sherbrooke, propriétaire passionné de MOTOS THIBAULT, et surtout Bruno Doyon, une perle rare qui se cache dans ses ateliers.

Nous avons donc fait venir toutes les pièces nécessaires de France que nous avons installées sur la WR450F 2008 toute neuve. Le cadre et le moteur sont absolument d'origine. Par contre tout le reste est modifié, de la suspension au faisceau électrique, en passant par les 4 réservoirs et le carénage enveloppant la tête de fourche. Un sabot réglementaire contenant 3 litres d'eau et un casier pour la balise de détresse a aussi été installé.

Toutes ces modifications ont leur raison d'être. Cependant celle qui demande le plus de soin est de loin le réglage des suspensions. STAR SUSPENSIONS á Sherbrooke m'a gratuitement modifié l'hydraulique arrière. En ce qui concerne l'avant, j'ai pris la décision á tord de conserver les ressorts d'origine, estimant qu'avec de l'huile de plus forte densité cela ferait le travail.

Ce sera ma première erreur de mise au point. Les fortes chaleurs et le nombre d'heures passées chaque jour sur la moto rendent l'huile extrêmement visqueuse. La fourche avant devient une vrai pompe á vélo, trop souple et sans énergie en détente, modifiant de surcroît l'assiette de la moto devenue plongeante et épuisante á tenir dans le sable mou.

Toutes les servitudes électriques ont été individualisées, chacune ayant son propre fusible. Ceci m'a permis de continuer á rouler lors d'une spéciale où le régulateur défectueux faisait sauter les fusibles. Avec un pontage sur le fusible d'allumage, la moto fonctionnait même sans ventilateur de refroidissement, ordinateur de distance, road book électrique et phares. Certes, je veillait malgré tout á ne pas monter dans les tours pour éviter une trop forte charge électrique qui aurait pu endommager la bobine.

Le montant total d'une préparation rallye correspond á environ 3 fois le prix de la moto neuve. Cela parait énorme et pourtant ces modifications sont indispensables. Le Dakar, c'est une Baja 1000 tous les deux jours, soit un total de 7 baja consécutives. A la création du Dakar en 1979, on pouvait imaginer rallier le lac rose sur une XT500 d'origine. Le rallye durait á l'époque 3 semaines et les pistes empreintées étaient largement plus faciles. Aujourd'hui le rallye se déroule dans un rythme d'enfer. Le tracé du parcours est de plus en plus technique. C'est le rallye extrême, le rallye des rallyes.

De tous les modèles ayant rejoint Buenos Aires, le WR450F est de loin le plus représenté. En effet KTM aligne plusieurs modèles (690, 640, 530, 525, 450) au départ alors que les pilotes ayant choisi Yamaha ne courent que sur des WR450F dont la partie mécanique est entièrement d'origine.

Bien entendu KTM se chargera de véhiculer le message révélant que KTM domine le rallye raid, d'autant plus que Marc Coma est leur pilote officiel. Tout cela est une question de marketing. Pour ma part, j'estime que la moto de Marc Coma est unique et que ce n'est pas moi qui la conduit. D'autre part le critère de puissance absolue n'est pas valable car il y a très peu de pilotes dans le monde capables d'exploiter á 100% ses machines modernes. Soyez surs que vous et moi n'en faisons pas partie á moins que vous ne soyez classés parmi les 20 premiers du championnat mondial de rallye raid.

Ce qui compte pour nous les usagers passionnés, c'est avant tout la disponibilité de la moto. On a besoin qu'elle démarre lorsqu'on la sort du garage, et qu'elle reste en marche jusqu'à ce qu'on décide que c'est assez pour aujourd'hui.

4 - Rattrapé par la réalité


Je viens d'avoir 45 ans. Nous sommes le 14 juillet et nous avons devant nous 3 bons mois pour trouver les fonds nécessaires. Je dit nous car dés le début ce projet est fédérateur. Mes amis m'octroient spontanément leur aide. Je rédigerais d'ailleurs un article qui leur sera spécialement dédié.

Le budget pour engager la moto s'élève á environ 75.000$ US. Compte tenu que je suis le seul résident du Québec sélectionné, je ne me fais aucun soucis pour la recherche de sponsors. L'avenir montrera qu'au Québec le Dakar n'est connu que par les rares passionnés. En tout cas une grande confusion règne sur le sujet, certains mélangeant le Dakar, rallye le plus long et le plus dangeureux du monde, avec le rallye des gazelles très médiatisé au Canada bien que ce ne soit pas un vrai rallye. Il s'agit en effet d'une vaste opération de promotion patronnée par des fabricants de cosmetiques avec pour toile de fond une opération caritative. Cette promenade dans les dunes ne représente aucun danger pour les participants largement encadrés. Les chaînes publiques sont payées pour promouvoir le rallye des gazelles sous formes de budget publicitaires alloués. En revanche, pour rediffuser le Dakar, les chaînes doivent payer un droit relativement élevé aux sociétés de production françaises. La participation des journalistes sur le rallye est aussi payante. Sur les 750 journalistes permanents du Dakar représentant 83 pays, aucun d'eux n'était du Québec.
Ces deux principes sont fondés exclusivement sur le business. Ils sont tous les deux respectables á mon avis. Le rallye des gazelles vise á augmenter les ventes de consommables alors que le Dakar génère ses profits sur le rallye lui même. La seule différence se situe en aval au niveau des spectateurs qui n'ont donc pas d'autre choix que de s'intéresser á l'un et d'ignorer l'autre. Néanmoins, ces deux évènements redistribuent des contributions á des oeuvres humanitaires dans des proportions moins connues mais largement supérieures pour le Dakar.

Pour l'heure, j'ignore encore que le Dakar n'est pas connu au Québec. Je suis tellement convaincu de pouvoir réunir la somme dans sa totalité que je n'hésite pas un seul instant á avancer les fonds, en commençant par l'achat de la moto. Mon choix se porte après mure réflexion vers une Yamaha. Bien que mon intention initiale était de participer avec une KTM, je me suis souvenu des deux machines que j'avais possédé dans le passé et qui ne m'ont valu que des soucis répétés. En revanche, mes motos suivantes ont été des Yamaha., le plaisir simplifié... La suite de l'aventure me démontrera que j'ai fais le bon choix...


3 - Qu'est ce qu'elle raconte?


Nous sommes le 12 Mai 2008. Catherine m'informe que le Dakar aura lieu en Argentine. Je pense tout d'abord qu'elle confond avec un autre rallye. Je suis tellement surpris que je me connecte sur Internet pour avoir enfin la preuve que ma femme est folle.

Effectivement, la société Amaury Sport Organisation dirigée par Etienne Lavigne a pris la décision de quitter l'Afrique compte tenu des menaces terroristes déjà subies en 2008.

Il faut se rappeler que 6 Français avaient été tués en Mauritanie la veille du départ du rallye. La course avait donc été annulée le jour même, au grand damne des tous les concurrents avertis lors du briefing général du vendredi soir à Lisbonne.

Les conséquences financières ont été très lourdes pour les pilotes et l'organisation. Bien que les pilotes aient pu récupérer le montant de l'inscription, ils ont tout de même perdu des milliers d'euros en frais divers.

Pour cette même raison, A.S.O a garanti aux pilotes inscrits en 2008 qu'ils seraient prioritaires pour l'inscription 2009. Rappelons que pour des raisons de sécurité, la Fédération internationale limite le nombre de motos à 250 pour les rallyes raid du type Dakar, ce qui est tout à fait compréhensible compte tenu de la distance couverte entre le premier et le dernier concurrent.

Je parcours le site officiel http://www.dakar.com/ entièrement jusqu'à rentrer dans la rubrique Inscription. Afin de me débarrasser d'un quelconque remord, je rempli soigneusement la fiche d'inscription. Il est en effet plus facile de se faire rejeter plutôt que de ne pas avoir le courage de participer, d'autant plus que seulement 50 nouveaux pilotes environ seront sélectionnés. Ça laisse très peu de chance.

J'annonce donc à Cathy que je viens de remplir le formulaire d'inscription en ligne, ce qui déclenche chez elle ce rire que j'adore.

Le 12 juillet, contre toute attente, je reçois la lettre de confirmation d'engagement. Je suis à la fois incrédule et en même temps assez flatté que l'on puisse considérer que j'ai le profil nécessaire pour courir le Dakar.


Eh bien mes amis, je vous garanti que le vrai Dakar... ça commence là !!!

mercredi 28 janvier 2009

2 - Comment réaliser son rêve


La plupart des gens s'imaginent qu'il suffit de souhaiter quelque chose très fortement pour que le rêve se réalise. C'est en effet une façon assez naïve et condensée de souligner la persévérance absolument nécessaire. Or, un rêve ne devient réalité que si l'on a cumulé tous les éléments nécessaires et incontournables un á un. Cela demande de la persévérance et de la patience. Pour ma part, il a fallu 25 années pour que les éléments suivants se mettent en place d'une façon imperceptible, jusqu'au jour où l'on découvre que cela devient possible.

1/ Des compétences // Le pilotage moto, la navigation, de l'endurance, du sang froid, de la maturité. 2/ Des moyens // L'incontournable argent, des relations. 3/ Un contexte favorable // Une épouse extraordinaire, de la disponibilité professionnelle, un esprit libre de tout soucis. 4/Beaucoup de chance

Et pourtant !!!

Bien des rêves ne se réaliseront jamais parce que les peurs, les doutes et le découragement sont les plus forts. Il est beaucoup plus facile de se réfugier dans la douceur de son rêve car cela ne comporte aucun risque.

Ne dit on pas ?
Cela ne coûte rien de rêver
Mais on dit aussi
C'est difficile, alors on n'ose pas. Pourtant c'est parce que l'on n'ose pas que c'est difficile.

Alors, cessons de vivre par procuration á travers les programmes de télévision du type reality show. Soyons conscients du présent et surtout conscients que nous ne sommes pas immortels. Rebellons nous contre les concepts d'aseptisation et de standardisation imposés par les lobbies et les pouvoirs publics... Réaliser ses rêves, ça commence par là !

1 - L'aventure dans les yeux d'un enfant


Dès notre plus jeune âge, nous sommes tous conditionnés par notre environnement familial et socioculturel. La nature des rêves de chacun de nous dépend du flux d'émotions et d'informations que nous enregistrons.

Ma famille, d'origine espagnole, s'est installée au Maroc en 1837, à l'époque où de nombreux Européens ont cherché fortune vers la terre promise. Le premier Navarro à avoir obtenu la nationalité Française a été le père de mon grand père né en 1862 dans ce qui était alors un protectorat Français. Puis mon grand père Mathéo, mon père Pierre, ainsi que ma soeur et mon frère, sont nés à leur tour sur le continent africain.

Des 19 cousins germains, je suis le seul né en France à mon grand regret. C'est certainement de cette situation qu'est née une grande attirance pour l'aventure à travers les récits merveilleux que l'on pouvait entendre lors des grandes réunions de famille. A l'époque de mes alleux, vivre au quotidien en Afrique représentait déjà une aventure. Les distances étaient contraignantes car les transports étaient d'autant plus lents que la nature des pistes précaires. Mon grand père, fermier dans le village de Martimprey du Kiss au Maroc oriental, est décédé dans la charrette qui le transportait à l'hôpital de Nemours en Algérie, distant d'une centaine de kilomètres seulement. Il n'avait que 37 ans et 7 enfants dont mon père alors âgé de 5 ans.

Parmi les récits paternels, ceux faisant référence à la jeep Hotchkiss qu'il conduisait pendant la seconde guerre mondiale me fascinaient. Il avait la pudeur de nous raconter cela comme une extraordinaire aventure, occultant volontairement la toile de fond dramatique et macabre de ces cinq terribles années. Comme il transportait le courrier entre l'état major et le front, il a parcouru des milliers de kilomètres dans la boue, le sable et les pierres, toujours en territoire hostile, seul dans la nuit, sans lumière pour ne pas être repéré par l'ennemi anxieux de mettre la main sur des documents importants. Il a reçu à ce titre une des plus hautes distinctions militaires avec palme d'argent.

Après la guerre, il a exercé le métier de chauffeur routier jusqu'au rapatriement massif en France de 1962. Il faut se rappeler qu'à cette époque les chauffeurs routiers en Afrique du nord étaient aussi et avant tout d'excellents mécaniciens. C'était tout simplement vital car il n'existait aucun moyen de communication entre le camion et la ville, et encore moins de systèmes de localisation. Il suffit de voir cette vieille photo du camion Berliet, la gazelle du désert, pour comprendre que ces gens là ont vécu le "Dakar" au quotidien dans l'anonymat le plus total, avec pour seule récompense l'honneur de la mission accomplie et la satisfaction de pouvoir sustenter leur famille. Mon regard vis à vis de ces héros n'a pas changé. Il est le même que celui que je portais lorsque j'étais cet enfant curieux et rêveur.
Le début des années 80 correspond à mon adolescence. Thierry Sabine, fondateur du Paris Dakar a contribué à faire connaître l'Afrique pour la plupart des gens. Dans notre foyer, l'Afrique rappelait l'Afrique. Je suis sûr aujourd'hui que mon père regardait ces images avec beaucoup de nostalgie et de tristesse. Pour ma part, c'était comme si je voyais pour la première fois tout ce que j'avais imaginé jusque là. Ces décors me semblaient si familiers que participer au Dakar en moto, génération oblige, deviendrait dès lors un de mes rêves les plus assidus.
Document d'époque sur Martimprey
C’est un poste militaire ,un village. Toutes les voies de communications de la région convergent à Martimprey du kiss. Un service régulier et quotidien par autobus pour le courrier postal et les voyageurs est assuré d’Oujda à Martimprey et Berkane . Les charrettes y sont nombreuses particulièrement pour le transport des marchandises .
La population du centre se compose de 1100 habitants dont 474 Européens . Le centre de Martimprey dépend du contrôle civil des Beni-Snassen dont le chef-lieu est Berkane . Les deux tribus rayonnant autour de Martimprey ( Beni khaled ) comptent environ 13000 indigènes sous l’autorité des Caïds Elyacoubi et Ould Ali .
Epiciers : Navarro ; Mirailles ; Bensoussen ; Bendenoun ; Cohen ; Bounouar ; Amsellem ; Choukroun .
Fabricant de crin végétal : Cailler .
Meunier : Cailler
Agriculteurs propriétaires : Thévenot ; Gaufreteau ; Compagnie Marocaine ; Navarro ; Pitzini ; Combette ; Pérez ; Krauss ; Tripart ; Pellelier ; Mirailles ; Boukris ; Murcia ; Baix ; de Nantes ; Vire .

mardi 27 janvier 2009

Introduction


J'ai eu la chance de pouvoir vivre l'expérience du Dakar 2009 en Argentine et au Chili du 3 au 18 janvier. Je viens tout juste de rentrer, je suis encore sous le coup de l'ivresse d'une telle aventure.


Cependant dans les jours qui suivront, je vais essayer de raconter ces diverses étapes, depuis l'élaboration du projet jusqu'au retour au Québec par -20 degrés. Ces récits seront agrémentés de photos magnifiques pleines de souvenirs.
Ce témoignage est dédié à tous les gens qui m'ont soutenus dans cette aventure, ainsi qu'à toutes les personnes qui croient encore à la liberté, à l'aventure et aux valeurs humaines.

Bonne lecture.... Pierre.